Marc Pilhes, la courte retraite du curé de Ranton (86) à Mauléon (79)

Parmi les chanoines de l’abbaye de la Trinité se trouvait en 1790 un dénommé Marc Pilhes. De lui, les historiens qui ont travaillé sur le passé mauléonais disent peu de choses. Dom Fourrier Bonnard indique qu’il a été prieur-curé de Ranton (Vienne) de 1763 à 1788. Louis Fruchard ne le cite pas. Il fallait donc chercher ailleurs pour en savoir un peu plus sur cet homme et essayer de déterminer quelle attitude il avait eu à la Révolution.

Qui était ce religieux ?

Il existe deux documents relatifs à cet homme. Le premier concerne une affaire judiciaire pour l’attribution du prieuré-cure de Saint-Martin de Ranton contestée par Guillaume Brancheu, prétendant au même bénéfice (700 livres) que Pilhes. Un arrêt de 1763 donne raison à Pilhes. Cette affaire ne nous est pas d’une grande utilité.

Installé à Ranton en 1763, Marc Pilhes quitte les lieux 25 ans plus tard, pour rejoindre l’abbaye de la Trinité de Mauléon où on le croise le 1er mai 1790. Il est en effet questionné lors de l’inventaire de l’abbaye réalisé par les autorités municipales à la demande du directoire des Deux-Sèvres. L’opération consiste à estimer les richesses de l’abbaye, et surtout à mettre la main sur une réserve de blé qui fait l’objet de toutes les rumeurs. L’inventaire ne permet pas de découvrir ce trésor mais aide à en savoir un peu plus sur le frère Marc Pilhes.

Aux questions que les autorités lui posent, le vieil homme répond qu’il est âgé de 77 ans, ajoute qu’il a passé 58 ans dans la Congrégation de France (Sainte-Geneviève) et qu’il compte quitter la région de Châtillon pour rejoindre son frère à Tarascon. Il souhaite en outre bénéficier de la pension fixée par l’Assemblée nationale en faveur des religieux de son âge. Autrement dit, à cette date, il adhère aux dispositions révolutionnaires.

La ville de Tarascon en question est située en Ariège où son frère, Paul, est avocat et procureur du roi. Les registres d’état-civil confirment ce qu’indique la Prosographie génovéfaine : Marc Pilhes est bien né le 11 janvier 1713 à Tarascon-sur-Ariège de Jean Pilhes et de Marianne Tremoulet. Nous ignorons leur profession, mais les Tremoulet comme les Pilhes font partie des notables. D’ailleurs un Pilhes, procureur, est signataire des cahiers de doléances de la ville en 1789.
Sans doute s’agit-il du frère du chanoine. Marié à Thérèse Borelly, ils auront Jean-François qui sera le père de Victor-Appolinaire-Ferdinand Pilhes (1817-1882), resté dans l’Histoire comme une des figures de la Commune de Paris, révolutionnaire, homme politique d’extrême gauche.
Cet homme, est l’arrière-grand-oncle de René-Victor Pilhes (né en 1934), publicitaire, écrivain, auteur de L’Imprécateur auréolé du prix Femina en 1974.

Quant au chanoine Marc Pilhes, nous en perdons toute trace après l’opération d’inventaire à l’abbaye de Châtillon. S’il a pu rallier Tarascon malgré son grand âge, nous ne le voyons cité dans aucun des registres de décès. Les registres de succession pourraient peut-être permettre d’avancer. Mais ils ne sont pas accessibles en ligne.
Tout indique en définitive que Marc Pilhes n’a pas vécu bien longtemps après son arrivée à Châtillon où se déchaîne la violence dans les mois qui suivent son installation.

Quant à son successeur à l’église de Saint-Martin de Ranton, il s’appelle Jean-Baptiste Senille (1761-1812) et vient de Thouars. Peut-être a-t-il prêté serment. On le voit signer les registres de Ranton en tant qu’officier public de décembre 1792 à mars 1794. Mais ce n’est manifestement qu’une façade. Le curé Senille est convaincu de royalisme. Condamné à mort, il réussit à se soustraire à la justice révolutionnaire et à rejoindre la Vendée, notamment la paroisse de Saint-Amand-sur-Sèvre où on le rencontre dans les registres en février 1794, en juin 1795, etc. En 1800, il est cité comme desservant à Moulins puis comme principal du collège de Bressuire.

Xavier MAUDET© 2020

Pour en savoir plus sur l’inventaire de l’Abbaye et Marc Pilhes, lire :
https://chatillonsursevre.fr/revolution-francaise/
Pour en savoir plus sur René-Victor Pilhes :
https://fr.wikipedia.org/wiki/René-Victor_Pilhes